Makja – « Sessions vivantes – Vol. 2 »

Avec Makja, 7 titres d’une « Session vivante vol 2 » suffisent pour que l’on se sente un peu plus en vie et lucides…

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Certains esprits bien charpentés, bien intentionnés, n’arrêtent pas de nous dire que la longueur fait la différence !… Pourtant, il peut arriver que la brièveté et d’une certaine forme d’urgence – réelle ou supposée – naisse le beau et le bon. Certes, l’on aime un peu plus ces albums qui prennent leur temps, figeant leurs notes sur plus d’une dizaine de titres et poussant au maximum les murs de leurs supports physiques – car oui, nous sommes anciens et donc aimons encore ces disques qu’ils soient cd ou vinyles ! – pour mieux nous combler. Mais il existe aussi, et c’est heureux, des albums plus brefs, plus concis, qui nous uppercutent et nous laissent aussi satisfaits que rêveurs.

Assurément, ces « Sessions Vivantes – vol. 2 » (qui d’emblée nous donnent envie d’aller jeter une oreille sur le volume 1 que nous avions loupé) de Makja font partie de cette dernière catégorie. En allant à l’essentiel, en ne cherchant ni l’inutile, ni le remplissage, l’artiste va directement au but, touchant nos esprits avec 7 titres qui parlent autant à nos tripes qu’à nos émotions les plus tendres. Car c’est bien là que Makja excelle, dans cette capacité à manier autant la colère que l’amour, la douceur que le choc frontal. C’est un tempérament nous direz-vous et vous aurez raison, tant son univers passe d’une atmosphère à l’autre sans heurt, sans même en avoir l’air. Avec sa voix brute, il va à l’essentiel, que ce soit pour égratigner les puissants ou dire ces mains amoureuses qui se caressent sans trop oser.

Rock et chanson, chanson rock, rock doux, Makja ne choisit pas et nous entraîne dans son monde, là où les mots disent l’ego et le ras-le-bol, où l’encre de sa plume délicatement dessine une carte de l’humain pleine de bosses et de creux, de hauts en couleurs et de bas de casse. Sa guitare saturée en bandoulière, on l’imagine tracer sa route sans se préoccuper des avis tranchés de ceux qui savent, préférant de loin la confrontation avec celles et ceux pour qui il écrit, vous, moi, nous.

A fleur de peau, qu’il nous conte un amour pur ou une mémoire qui flanche, qu’il nous entraîne dans sa saine révolte contre la tyrannie de l’égo d’un « Roi Soleil », dont on connaît tous le visage, ou espère l’emballement des chevaux de la révolution, qu’il se serve de ses propres mots ou utilise ceux d’Orelsan (« Tout va bien »), rien, jamais, dans ces 7 titres, n’est superficiel ou dispensable. Au contraire, chaque morceau vient nous cueillir en douceur, nous embarquant dans un grand huit émotionnel entre ombre et lumière, un voyage auquel l’on n’est pas préparé et qui nous fait vivre des émotions aussi diverses que fortes.

Avec ses notes, avec ses mots, Makja allume de petites bougies dans nos existences pleines de nuit et de brouillard, il leur offre, le temps de quelques secondes, quelques minutes, un petit peu de force en plus, un petit peu de calme en moins. En déchirant – un peu – le voile qui obscurcit nos ciels, il ouvre pour nous des fenêtres vers un ailleurs fait d’amour et de lucidité. Surtout, il le fait non pas en nous donnant des leçons ou en nous bousculant plus ou moins gentiment, mais plutôt en nous donnant les clés pour que nous puissions, à notre rythme, selon notre volonté, nos désirs, suivre le chemin qu’il nous a tracer et ouvrir, plus ou moins, nos yeux de rouille face à ce temps qui passe et ces gens qui profitent de notre apathie.

En plaçant l’humain et le partage au centre de tout – lui qui joint les actes aux paroles en œuvrant au quotidien pour des publics trop souvent délaissés (enfants, personnes âgées, prison, hôpitaux) -, Makja, avec cette poésie brute qui, peut-être, lui vient de son passé dans le rap, nous touche au plus profond de notre âme, posant ses mots sans artifice et ses mélodies sans superflu, sur nos émotions plus ou moins maîtrisées, plus ou moins cachées.

Autant dire que l’on ne ressort pas totalement indemne de cette écoute et que longtemps après avoir refermé ce chapitre, il nous revient en mémoire ces rimes et cette voix, ces petits riens qui font de belles ou fortes histoires, ces tranches de vie que l’on croirait sorties de notre propre parcours. Et invariablement l’on se demande si l’on aurait pas aimé, finalement, avoir quelques titres de plus à se mettre sous la dent, pour que le plaisir se prolonge et trouble un peu plus encore nos émotions. Qui sait, peut-être bien que d’éventuelles « Sessions vivantes – vol. 3 » combleront ce manque et passeront la barre des 10 titres !… En attendant, on se repasse en boucle ces 7 morceaux-là et c’est déjà pas mal !

 

 

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Marilyn Manson – « We are chaos »

Marilyn Manson revient en grande forme avec « We are chaos »…

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Jamais, au grand jamais il ne sera dit que se promener le long des boulevards chaotiques de Marilyn Manson sera de tout repos. Car ici, comme quasiment dans chacun des 10 albums qui, depuis 1994, ont précédé ce nouveau cauchemar éveillé, il n’y aura de douceur innocente, de calme bucolique et de paix intérieure. Car la légende de cet improbable mélange entre métal, indus, glam et horreur-show revient en grande forme, après s’être quelque peu perdu entre expérimentation et auto-plagiat, avec son lot d’obsessions, de tortures psys – lui qui dit n’être qu’une personne brisée qui ne veut pas être réparée – et de violence plus ou moins rentrée. Un album, douze titres (ou dix si vous êtes du genre pinailleur), et une balade sanglante dans un univers fait de creux et de bosses, grand huit sonore avec des titres qui s’imposent doucement et d’autres qui grattent, des hymnes faits pour faire chavirer les stades et d’autres qui donnent juste envie de se gratter la peau jusqu’à l’os. Depuis qu’il est arrivé sur nos platines, Marilyn Manson s’ingénie ainsi, à de rares exceptions près, à nous livrer des opus qui soufflent le (très) chaud et le (presque) froid, objets musicaux capables de fédérer les masses et, en même temps comme dirait l’autre, de ne pas trop se couper des puristes.

Ainsi en est-il de cet album, « We are chaos », qui commence en douceur, ambiance indus et voix traînante métallique, angoissante, poisseuse, presque dérangeante, comme tout droit issue d’un film d’horreur dont on serait bien malgré nous le héros, batterie martiale en prime et cri primal assourdi en introduction. Ainsi en est-il de ce énergumène qui, ensuite, nous balade aimablement entre « douceur » paradoxale (« We are chaos », « Solve Coagula »), bluette gentille (« Paint you with my love »), sonorités indus pesantes (« Infinite darkness »), fait sonner comme personne le reste du temps des guitares trop longtemps brimées dans leur élan et une rythmique en béton armé (« Don’t chase the dead », « Perfume »,  « Keep my head together ») avant de fermer son nouveau chapitre avec une douceur fort classique à la guitare sèche, perverse fin qui nous laisse aussi ravis que frustrés. Et c’est bien là la grande force de ce nouvel album, rester dans sa forme et ses thématiques dans le fonds de commerce ancestral de Marilyn Manson, assurant ainsi notre satisfaction profonde, et même disons-le pour certains une sorte de réconciliation après quelques opus moins transcendants, tout en nous frustrant de ne pas en avoir plus, de devoir nous contenter d’une quarantaine de minutes alors qu’on sent que ce retour en forme aurait fort bien pu se concrétiser par quelques titres de plus, de nous offrir quelques moments d’anthologie – pas forcément les mêmes pour tous d’ailleurs  ! – sans pour autant céder à une trop grande facilité, réussissant même, ici ou là, à nous surprendre en n’allant pas forcément là où on l’attend.

Alors oui, on ne pourra dire que ce « We are chaos » est le meilleur album du sieur Manson puisqu’il ne nous entraîne pas dans des contrées jusque-là inexplorée par lui, mais une chose est sûre c’est que c’est sans conteste possible l’une de ses meilleurs livraisons, de celles qui se découvre peu à peu au fil des écoutes, qui peuvent ainsi laisser relativement perplexes au premier abord mais petit à petit creusent une galerie au plus profond de notre esprit et finissent par s’imposer comme une évidence lorsque vient l’heure de dresser des bilans. En tout cas, la trajectoire est bonne donc il n’y a plus qu’à attendre avec impatience la suite de l’aventure pour continuer la route en sa compagnie…

 

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