Bloquée derrière la vitre d’un cinéma hors d’âge, comme scotchée dans une autre époque, un autre temps, dans une décennie d’un autre siècle, elle trompe son ennui en rêvant d’un horizon qu’elle n’atteindra jamais. Loin de ses rêves et désirs, ses journées se finissent tristement autour d’un verre, seule, guettant un regard, un désir, l’esquisse d’un rapprochement avec un autre être, fut-il le temps d’une danse solitaire, puis elle s’enfuit, seule, vers un ailleurs que l’on ne peut que deviner, triste et sans joie.
Cette petite tranche de vie d’un autre temps, celui de l’absence des réseaux sociaux, des médias de rencontres et de la superficialité du contact, Paprika Kinski, par ailleurs créatrice de tenues de scène pour Grimes ou FKA Twigs, la met délicatement en musique avec « All you need », nous replongeant, nous qui avons eu la chance de connaître seventies et eighties, dans cette période insouciante où le plus fou pouvait côtoyer le plus ennuyeux, où l’on pouvait aussi bien fantasmer sa vie que vivre des expériences loin de la norme. Voix douce et pop ambiante, dans la droite ligne de l’indice anglaise qui a bercé notre fougueuse jeunesse, son invitation est de celles qui procurent de délicates sensations paradoxales, nous laissant à la fois rêveurs et comblés, nostalgiques et heureux d’être ici et maintenant puisque cela signifie avoir le plaisir de pouvoir écouter encore et encore Paprika Kinski…